
Confinement : de la peur à l’engagement !
Ce terme qui sonne comme le glas de notre liberté sous-entendrait une plus vaste réalité. Une occasion inespérée d’aller à la rencontre de nos émotions et travailler l’acceptation, avec l’aide de la méditation. Ainsi, plutôt que de se confronter aux confins de notre liberté de mouvement, considérons ce moment comme un tremplin vers notre exploration intérieure.
Confinement ! Le mot est tombé avec effet immédiat en France, le Mardi 17 Mars 2020 à 12 h. Presque désuet,
hier encore, il s’est imposé dans notre réalité avec force, nous sommant de « Rester chez nous », avec des consignes, qui au fil des jours tendent à devenir drastiques, pour cause de pandémie
galopante. La situation s’avère résolument inédite, radicale, menaçante, chamboulant tous nos repères, qui plus est pour un temps indéterminé, et entraîne inévitablement de nombreux remous…
intérieurs. Puisque c’est bien de ça dont il s’agit : rester à l’intérieur.
« Sauvez des vies : restez chez vous », nous martèlent les instances gouvernementales, et les soignants. Une immense responsabilité, et un véritable défi qu’il va bien nous falloir
relever. Bonne nouvelle, de nombreuses initiatives « collectives » ont fleuri sous l’impulsion du printemps naissant, entre cours de yoga en ligne, méditations ou mantras, rendez-vous rituels au
balcon à 20h en soutien aux soignants… Toutes ont pour objectif d’être en lien, se soutenir, s’amuser, s’occuper, s’évader de la réalité du confinement… face à l’urgence sanitaire. Toutefois, «
confinement » oblige, c’est aussi une aventure intérieure à laquelle nous convie cet épisode qui restera dans les annales sous le nom de Covid-19, où nous allons faire face à bien des obstacles,
affronter nos peurs et découvrir dans ce temps de l’intime ce qu’il est vraiment de notre engagement dans cette grande mutation...
Confins : « Au ve siècle av. J.-C, l'historien Hérodote dessina une carte du monde afin de pouvoir structurer le monde dans lequel il vit. (...) on peut apercevoir les confins, les extrémités que l'historien qualifie comme les lieux les plus beaux et rares. Cependant il caractérise également ces lointaines contrées de sauvages. En effet ces peuples inconnus ne partagent pas les mêmes normes, le même mode de vie que ceux qui vivent au centre. D'un côté l'historien reste fasciné face à ces terres et de l'autre ces fameux confins le déroutent. »
Faire face à un cortège d’émotions
« Nous sommes traversés par un cortège d’émotions, la peur la tristesse, la confusion, la culpabilité, comme celle de devoir rester loin de sa famille, l’ennui, la frustration, des sentiments
d’abandon et de solitude... » énumère le docteur François Bourgognon, psychiatre, psychothérapeute, formateur en Méditation de Pleine Conscience. Si nous avons dû faire face à la sidération
dans un premier temps, le ciel de notre météo émotionnel s’est fortement couvert ; nombreux sont ceux qui osent en témoigner sur les réseaux, ou lors de conversations « distanciées ». Comment
pourrait-il en être autrement ? Alors que notre société, hier encore, fonçait à vive allure vers ce qu’on pressentait… sa chute, entre désordre climatique, effondrement, et mutation annoncée,
sans qu’on sache bien qu’elle forme elle allait prendre, nous voilà tous à l’arrêt, confinés, face à des menaces tels que la contamination, l’isolement, ou le fantôme d’une pénurie alimentaire,
voir d’une crise économique majeure. « Cette situation paraît presque irréelle, par son côté spectaculaire ! Et à l’évidence, nous n’y étions absolument pas préparés» soutient le
psychiatre.
Tenter de les maintenir à distance n’est pas une bonne stratégie, à long terme. Si l’émergence de peurs archaïques est loin d’être confortable, comme en témoignent certains épisodes comme l’exode
des parisiens en province, et la ruée dans les hypermarchés, les reconnaître est tout à fait sain. « Nous devons faire face à une terrible réalité sur laquelle nous n’avons qu’une prise très
partielle – à commencer par le respect des règles d’hygiène et des mesures de confinement – et qui va nous demander du courage » décode le Dr Bourgognon. À l’inverse, le déni, ou l’évitement,
ne vont pas faire disparaître la situation, et peut même entraîner des comportements irresponsables, comme nous avons pu le voir, et dangereux pour soi, et la communauté !
Accepter : une stratégie gagnante
« Lutter contre une réalité qui s’impose à nous est contre-productif ! » assène le psychiatre. Si un premier réflexe est de la refuser en bloc, il est bien plus habile de faire avec ce qui
ne peut être évité ou changé. Le Dr Bourgognon ajoute : « Nous sommes pris dans un courant plus fort que nous ! L’accepter, c’est ne pas « lutter contre » mais plutôt « faire corps avec » pour
ne pas couler et pouvoir arriver quelque part ». Ça consiste à changer de posture face à l’adversité, à sortir du mode réactif. En phase de confinement, peut-être que le mieux que nous
pouvons faire est de ne pas aggraver la situation avec nos réactions, même si la tentation de transgresser les consignes nous traverse.
Comment s’y prendre ? La première étape consiste à s’installer dans le moment présent et à se désengager du mode réactif habituel, c’est-à-dire de la tendance à vouloir que les choses
soient différentes de ce qu’elles sont. Il s’agit de reconnaître la réalité de la situation, et les émotions que cette réalité génère en nous. Les reconnaître va éviter qu’elles agissent à votre
insu.
Pour vous y aider, voici une mini-méditation appelée les « 5 R » qui propose une démarche claire et systématique pour faire face à l’adversité.
Méditation - L’exercice des 5 « R »
Ralentir, ou même s’arrêter.
Regarder :
Quelle est la situation ?
Quelle est mon expérience (pensées, émotions, sensations) ?
Respirer :
Recentrer son attention sur les sensations physiques de la respiration.
Reconnaître :
Élargir le champ de conscience à la globalité de l’expérience.
Qu’est-ce qui ne peut être évité ou changé ?
Répondre :
Choisir sa réponse plutôt que réagir automatiquement.
Donner du sens au confinement
Derrière ce défi à relever intérieurement en solo, se profile également un autre enjeu : le collectif. La pandémie se répand inexorablement sur la planète, et le confinement s’impose sur des
territoires de plus en plus nombreux. Que vous soyez seul, en couple, ou en famille, en réalité, cet évènement se vit à une grande échelle. De notre engagement collectif va dépendre l’issue
positive. Bien plus qu’un simple conseil de développement personnel, ou spirituel, il semblerait que se présente une authentique opportunité de revenir à l’essentiel, de remettre nos valeurs au
premier plan, et de nous engager collectivement. Ce fameux passage du « Je » au « Nous ». « Les valeurs représentent ce qui est important pour soi ; elles sont à comprendre comme des
directions à suivre et non comme des objectifs à atteindre. » précise le psychiatre.
En pratique : Prenez un temps intérieur pour identifier vos valeurs ; l’altruisme, la tolérance, la disponibilité, la loyauté, la générosité, la flexibilité… C’est à chacun de définir ce
qui est important pour soi dans sa vie. Puis, posez-vous la question : « Qu’est-ce que je peux faire d’utile, pour avancer en cohérence avec mes valeurs, dans cette réalité-là ? Comment mettre
mon énergie au bon endroit, faire ma part de colibri, pour ma famille, mes proches, ma communauté, mon immeuble… ». Plus que jamais, il importe de garder le cap et de continuer à avancer – ne
serait-ce qu’en faisant de tout petits pas – dans une direction qui a du sens pour nous. « Au final, et quelle que soit notre situation, il n’y a pas de réponse plus puissante que de regarder
la réalité du moment bien en face, d’accepter ce qui doit l’être, et de continuer – du mieux possible – d’agir en direction de ce qui nous importe. » conclut le Dr François Bourgognon.
Par ailleurs, face à notre obligation d’isolement, une clé importante est de garder les yeux bien ouverts sur tout ce qui va éclairer ce passage, comme le fleurissement d’initiatives pour rester
en lien, et solidaires, témoins de notre impérieuse soif à être ensemble, et la possibilité d’une nouvelle vision collective. Ce temps de retour à soi, peut aussi être le terreau de remises en
question de nos valeurs, de nos comportements, pour un profond changement de nos modèles, avant de nous retrouver, ensemble, dans la chaleur de notre humanité pour partager nos rêves d’un monde
différent, quand la pandémie sera derrière nous.
Ce qui va immanquablement arriver.
PUBLIÉ LE 26/03/202
INRES
Auteure :
-
Catherine Maillard